Kurdistan

  • Rojava : Kurdes, Musulmans, Sunnites et Chrétiens

     

    Sur le plan éthique, on peut comprendre les Kurdes de vouloir obtenir une certaine autonomie à l’intérieur de la Syrie. Ça s'appelle le fédéralisme. Les États-Unis en sont un exemple, étant eux même une république constitutionnelle fédérale. La fédération de Russie en est un autre exemple, la Suisse, le Canada et tant d'autres. 

    À la faveur du chaos créé par la guerre, les Kurdes de Syrie ont créé – le long de la frontière turque, entre l’Euphrate et l’Irak – une Fédération démocratique de Syrie du Nord, qu’ils ont baptisé Rojava ("Ouest" en kurde). La zone a été chèrement reconquise à l'EI. En janvier 2014, ils se sont même dotés d’un « Contrat social », sorte de constitution.

    Mais les kurdophones sont loin d’être les seuls habitants de la zone, qui se reconnaît d’ailleurs trois langues officielles : l’Arabe, le Kurde et le Syriaque. Car y vivent des Kurdes, certes, mais aussi des Arabes (musulmans, sunnites et chrétiens) et des Arméniens. La population kurde représenterait 60 % de la population totale (notamment dans le canton de Kobane). 

    À l’extrême nord-est de la Syrie, proche de la frontière turque, la vallée du Khabour compte – ou plutôt comptait – une trentaine de villages chrétiens avant la guerre et d’importantes populations chrétiennes vivaient aussi dans les villes de Hassaké et Qamichli. Originaires de Mésopotamie, ces Assyriens – appartenant le plus souvent aux Églises syriennes orthodoxe et catholique – vivaient là depuis que le génocide turc les avaient chassés de leurs régions ancestrales, celles du Tur-Abdin et des montagnes du Hakkari. 

    Certains redoutent la volonté de certains officiels kurdes de provoquer des départs, pour renforcer l’homogénéité ethnique de la zone. De nombreux réfugiés, musulmans et chrétiens, s’entassent toujours à Alep, faute de pouvoir rentrer chez eux.

    Lorsqu’il a été occupé par l’Armée syrienne libre (ASL), beaucoup de gens ont fui. Depuis que les Kurdes ont chassé l’ASL, les musulmans sont allés visiter leurs maisons. mais ils ne peuvent pas s'y réinstaller. Les habitations comme les magasins appartiennent désormais au parti kurde. S'ils veulent les récupérer, il faut payer. 

    Il ne faudrait pas que cette autonomie aboutisse à nier la diversité ethnique et religieuse qui prévaut dans la région. D'ailleurs, les Kurdes se sont engagés à remettre aux autorités syriennes les territoires non kurdes, en échange du fédéralisme. Damas refuse le fédéralisme.

    Et les Turcs avec leur offensive, provoquent également des milliers de déplacés kurdes. Remettront-ils les territoires conquis à la Syrie ?  On peut penser que non. Mais on verra.

  • Kurdistan irakien : résultat du référendum : 90% « Oui »

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    Rouge        : Territoire officiel de la région du Kurdistan irakien

    Rose foncé : Territoire conquis par le Kurdistan irakien 

    Rose pâle  : Autre territoire revendiqué par le Kurdistan irakien

    Blanc        : L'Irak non kurde

     

    Les Kurdes d’Irak disent « oui » à l’indépendance

    Selon la chaîne de télévision kurde Roudaou, le "oui" aurait dépassé les 90%. Massoud Barzani invite la communauté internationale à respecter la volonté de millions de personnes qui se sont prononcées en faveur de l’indépendance. Il invite également le gouvernement irakien à entamer un dialogue sérieux plutôt que de brandir des menaces. Par contre, le premier ministre irakien exclue toute négociation.

    Après un demi-siècle de conflit, les 5 millions de Kurdes ont voté pour l’indépendance du Kurdistan irakien. Leur mémoire est peuplée de proches morts au combat, de clandestinité, de terreur (attaque au gaz sarin par Sadam Hussein) et d’exil. C’est le rêve de tout Kurde d’avoir un état indépendant. 

    L’autonomie du Kurdistan irakien est reconnue par la constitution irakienne depuis 2005. Les Kurdes contrôlent leurs propres institutions. Ils émettent leurs propres visas et la présence de consulats étrangers à Erbil, la capitale, rend possible les relations diplomatiques directes avec différents pays. Le Kurdistan irakien contrôle ses frontières avec ses pays voisins (Turquie, Syrie, Iran) où se trouvent également des millions de Kurdes. Les jeunes générations n’ont connu qu’un système éducatif en langue kurde. L'autorité de Bagdad y est complètement absente.

    Le pouvoir est exercée par deux factions politico-militaires : le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK). La capitale étant Erbil. Le Kurdistan irakien comprend trois provinces, celles de Dohouk, Erbil et Souleymanieh. Dans les faits, les zones d’influence de l’UPK et du PDK s’étendent au-delà, dans les territoires placés officiellement sous l’autorité de Bagdad, mais contrôlés en réalité par les Kurdes. Ces territoires comprennent la province du Sinjar, une partie de la plaine de Ninive, ainsi qu’une partie de la province de Kirkouk.

    Dans la ville de  Kirkouk, les factions kurdes contrôlent les forces de sécurité et la vie économique depuis 2003, soit depuis la chute de Saddam Hussein. L’exploitation des ressources en pétrole de Kirkouk est vitale pour la survie économique d’un Kurdistan indépendant. Les tensions montent entre les forces kurdes et les milices chiites, notamment dans les zones mixtes situées autour de la ville, où cohabitent une majorité kurde avec des minorités arabe et turkmène. C'est le premier endroit où les forces militaires irakiennes interviendraient pour défendre les minorités. En effet, le premier ministre irakien laisse planer la menace d’une intervention militaire. 

    Al-Koch aussi relève officiellement de l'autorité de Bagdad, mais est en fait tenue par le PDK. Les autorités kurdes entendent l’incorporer au Kurdistan indépendant. Ce que redoute la communauté chrétienne y vivant. Elle voudrait faire partie de l'état irakien.

    Le Kurdistan irakien est en fait une zone correspondant aux sphères d'influence combinées de deux factions kurdes. Issus de la guérilla kurde contre le régime de Saddam Hussein (1979-2003), le PDK et l’UPK se sont affrontés au cours d’une guerre civile (1994-1998), avant de se partager le territoire et l’administration de la région kurde, créée après 2003. Ils conservent leurs propres forces militaires et de sécurité ainsi que des intérêts économiques et des réseaux clientélistes distincts.

    L’initiative du référendum a été prise par le président de la région autonome du nord et chef du PDK, Massoud Barzani. Son initiative a reçu le soutien officiel de petits partis satellites et de l’UPK qui contrôle le sud.

     

    Des voix dissidentes estiment que le Kurdistan n’est pas prêt pour l’indépendance. Le mouvement Gorran a boycotté la session du Parlement confirmant la tenue du référendum. Le 12 septembre, le Parlement fédéral a voté contre la tenue du scrutin. La Cour suprême irakienne avait ordonné le 18 septembre, la suspension du référendum jusqu’à ce qu’elle puisse en examiner sa constitutionnalité. 

    L’Iran menace de fermer sa frontière avec la région autonome et de mettre fin à tous ses accords de sécurité avec celle-ci si elle venait à proclamer l'indépendance. La Turquie s’oppose également à l'indépendance. Le pays, qui entretient de bons rapports commerciaux avec Erbil, redoute l’effet contagieux que pourrait avoir la création d’un état kurde à sa frontière. 

    Estimant que l'indépendance des Kurdes est une entrave à la lutte contre l’État islamique et à la stabilisation des zones libérées, les États-Unis expriment aussi leur désaccord. Washington menace de cesser tout soutien politique, militaire et diplomatique au Kurdistan irakien. 

    Les Nations Unies proposent à Erbil son aide pour mener des négociations avec Bagdad. Elle n’a jusqu’ici pas reçu de réponse de la part de M. Barzani.

    Les Kurdes ont su, non seulement mobiliser l’ensemble de leurs forces sur le terrain et protéger leur frontière, mais aussi accueillir 2 millions de réfugiés. Et c’est à l’heure même où les fous de Dieu s’apprêtent à rendre les armes, que les Kurdes victorieux, annoncent leur goût pour l'indépendance. Nul ne doute que l’affirmation de leur souveraineté aura un effet d’entraînement dans la région. 

    Le référendum est également présenté comme un moyen d’affermir la position kurde dans l’optique de négociations avec l’état central.

     

     


     

  • Le référendum kurde irakien

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    Rouge        : Territoire officiel de la région du Kurdistan irakien

    Rose foncé : Territoire conquis par le Kurdistan irakien pendant la seconde guerre civile irakienne

    Rose pâle  : Autre territoire revendiqué par le Kurdistan irakien

    Blanc        : L'Irak non kurde

    Malgré l’opposition de lIrak, de l’Iran, de la Turquie et des États-Unis, un référendum sur l’indépendance se tiendra le 25 septembre dans la région autonome du Kurdistan irakien. Son issue ne fait aucun doute : les Kurdes voteront massivement « oui ». Cependant, ce « oui » ne sera pas effectif immédiatement. Il permettra tout d'abord au président kurde Barzani, de renforcer son autorité sur la province et de réclamer encore plus d'autonomie à Bagdad.

    Les autorités kurdes irakiennes jouissent déjà depuis 1991 d’une large autonomie. Une victoire du «Oui» ne les engagera pas automatiquement vers un processus d’indépendance mais dans un premier temps, vers une position de force dans un dialogue sérieux avec Bagdad. La balle sera désormais dans le camp irakien, obligé de se rendre à la table de négociation en position de faiblesse.

    Israël est le seul pays à se prononcer en faveur du référendum, dans le but de diminuer l’influence de l’Iran et de la Turquie dans la région. 

    Le gouvernement irakien en profite et affirme qu'il ne permettra pas la création d’un « deuxième Israël » au nord de l’Irak. Sa cour suprême ordonne la suspension du référendum et par la même occasion, Bagdad se dit prêt à une intervention militaire en cas de menace de la part des combattants kurdes peshmergas. Cette position irakienne est soutenue par Ankara, Téhéran, Washington et Londres. Mais Bagdad a-t elle une armée assez puissante pour soutenir ses paroles ? 

    L'Iran, quant à lui menace de fermer sa frontière avec le Kurdistan irakien. Il en a les moyens. La Turquie fermement opposée à la tenue du référendum, effectue un exercice militaire à la frontière du Kurdistan irakien. Son armée est puissante. Même les États-Unis ont déclaré qu'ils suspendraient leur aide militaire, si les Kurdes allaient au bout de leur initiative. La France tient à la dimension fédéraliste et à l’intégrité territoriale de l’Irak.

    L’unité territoriale est une des conditions posées par la communauté internationale pour la reconstruction du pays. Washington et ses partenaires allemands, britanniques, français et italiens ne souhaitent pas soutenir une éventuelle demande d’indépendance. Fait intéressant, l'Assemblée générale des Nations-Unies arrive avec une solution alternative au président Barzani, lui proposant d'aboutir d'ici trois ans à un accord entre le Kurdistan irakien et le gouvernement fédéral irakien sur le statut de la région autonome.

    Tout en reconnaissant aux peuples, y compris aux Kurdes, le droit d'avoir leur état, la Russie soutient l'idée de l'intégrité territoriale de l'Irak. La compagnie russe Rosneft investira dans les infrastructures gazières du Kurdistan irakien et permettra ainsi au Kurdistan irakien de devenir un important exportateur de gaz vers la Turquie et l'Europe.

    Le Kurdistan irakien exporte déjà du pétrole depuis 2014 en toute indépendance vis-à-vis du gouvernement central irakien et Rosneft, compagnie contrôlée par l'état russe, apporte à cette région semi-autonome plusieurs centaines de millions de dollars de prêts garantis par de futures ventes de pétrole.

    Rosneft élargit désormais ses investissements au secteur gazier, dans le cadre d'un accord portant sur le financement d'un gazoduc, ont annoncé la compagnie russe et le gouvernement régional du Kurdistan. Cet investissement dépassera le milliard de dollars.

    Le Kurdistan irakien puise une partie de ses ressources financières dans des accords de préfinancement pour l'exploitation de ses réserves de pétrole mais il peine jusqu'à présent à développer ses importants gisements de gaz. L'implication de Rosneft, plus importante compagnie pétrolière mondiale cotée en bourse, devrait favoriser le développement de son secteur gazier. La capacité de ce gazoduc devrait permettre au Kurdistan d'exporter jusqu'à 30 milliards de mètres cubes par an. 

    À suivre...