L'offensive majeure de l'Armée Arabe Syrienne sur Alep, marque le point tournant de la guerre. « La bataille d’Alep est le centre de l’échiquier syrien, c’est un tournant décisif dans la guerre », analyse Fabrice Balanche, géographe de l’Université de Lyon, associé au Washington Institute. Les rebelles d'Alep-Est dont l’Armée Syrienne Libre fait partie de même que le Front al Nosra filiale d'al Qaïda, sont désormais confrontés à un siège total de la part du régime. Une tactique déjà employée pour faire tomber d'ex-bastions rebelles comme Homs (centre).
Les djihadistes et leurs alliés internationaux comme la Turquie et l'Arabie saoudite, n'ont plus beaucoup d'options. L'armée russeobserve une préparation secrète des forces armées turques afin de mener des opérations sur le territoire syrien. Elle accuse Ankara d'armer sous couvert de convois humanitaires, les groupes combattant dans les régions syriennes d'Alep et d'Idleb. Elle note également des tirs d'artillerie turcs sur des localités syriennes frontalières inhabitées.
Un accord tacite existe probablement entre le régime Assad et les forces kurdes, pour favoriser la neutralisation des djihadistes. Les Russes travaillant fort dans le but que le PYD kurde participe aux négociations de paix, l'indique.
Les Occidentaux, qui avaient soutenu au départ les groupes djihadistes pour déstabiliser Assad, semblent maintenant hors-jeu. Les derniers succès d'Alep placent Vladimir Poutine au centre de l'échiquier, contrairement aux mauvaises prévisions occidentales, indiquant que l’intervention russe s’enliserait dans un bourbier. Mauvaise analyse dû à la mauvaise perception de la réalité par l'Occident.
Le président russe aurait d’ores et déjà atteint son triple objectif : « Protéger la côte pro-régime où la Russie a installé ses bases, renforcer Assad et éloigner les rebelles des principales villes du pays (Homs, Lattaquié, Alep et Damas), puis couper les soutiens étrangers aux rebelles » affirme Patrice Balanche.
Le régime syrien peut en remercier ses alliés. Acculé dans son fief, notamment dans la province de Lattaquié, qui juste avant l'intervention russe, commençait à recevoir des rockets. L'armée est maintenant à l'offensive sur tous les fronts. Grâce à l'appui aérien de la Russie et l'implication des Iraniens au sol, l'armée syrienne a pu sécuriser une grande partie de la Syrie utile, particulièrement les provinces de Homs et de Lattaquié, tout en sécurisant maintenant la ville d'Alep.
Ces offensives obligent désormais les rebelles à reculer dans le Sud, dans la province de Deraa, et surtout dans le Nord, dans la province d'Alep, où l'opposition armée est dorénavant encerclée: les Kurdes du PYD (Parti de l'Union démocratique) sont à l'Ouest, l'État islamique tient la zone d’Al-Bab à l’Est et les forces du régime avancent sur eux depuis le Sud.
Pendant que les Sukhoi russes bombardent nuit et jour les positions rebelles, le vice-premier ministre russe déconseille vivement de lancer un défi aux nouveaux chasseurs Su-35 déployés sur la base aérienne de Hmeimim en Syrie. "Nous vous déconseillons de lancer un défi à cet oiseau qui vole dans le ciel de Syrie", a déclaré M. Rogozine sur son compte Facebook.
Les Iraniens encadrent les forces au sol. Pour compenser le manque d'hommes au sein de l'armée syrienne, l'état major s'appuient sur des milices chiites irakiennes (2.500 hommes)et sur les hazaras afghans et le Hezbollah. L'armée syrienne, elle, utilise ses forces d'élite jusqu'à épuisement. Aux dernières nouvelles, l'armée a pris le quartier général d'al Nosra àSalma, dans la province de Lattaquié.
Les victoires du régime sont marquées certes par le sceau de l'Armée Arabe Syrienne mais aussi par celui des Russes, des Iraniens, des Libanais, des Irakiens et même des Afghans. Ce sont eux qui tiennent le terrain (les troupes au sol). En contre-poids, certains pays dont l'Arabie saoudite menacent eux aussi d'envoyer des troupes au sol pour soutenir la rébellion.
Prochaine étape : Occuper la partie du Nord-Ouest que les rebelles protègent avec acharnement, recevant de nouvelles armes et hommes venant de Turquie.
Pendant ce temps, les tentatives de pourparlers de paix sous l'égide de l'ONU vivotent et déclinent.
Sources:
L'Orient le Jour : La rébellion syrienne menacée d'effondrement face au régime et son allié russe, Sara Hussein, 07/02/16
L'Orient le Jour : Le régime syrien sous perfusion russo-iranienne à Alep, Anthony Samrani, 07/02/16
L'Est républicain : La bataille d'Alep, un tournant, Xavier Frère, 07/02/16
L'Orient le Jour : L'armée russe a "de sérieuses raisons" de croire que la Turquie prépare une "intervention militaire" en Syrie, 04/02/16