Ukraine : Négociations russo-américaines

Telechargement 2L'Ukraine

L'Ukraine ayant des frontières communes avec la Russie et l'Union Européenne, entretient en tant qu'ancienne république soviétique fondée par Lénine en 1919, des liens sociaux et culturels profonds avec la Russie. Auparavant, elle faisait partie intégrante de ce pays. D'ailleurs, la langue russe y est largement parlée. En 1991, elle devient le pays que l'on connaît aujourd'hui. Lors des élections démocratiques d'avant 2014, la population était 50% en faveur de la Russie et 50% en faveur de l'Occident. Quelques pourcentages faisaient la différence entre un gouvernement pro-russe ou pro-occidental. Comme le démontre la carte ci-contre, lors des résultats des élections de 2010 mettant au pouvoir le candidat pro-russe, plus on est prêt de la Russie, plus on est pro-russe (bleu). Plus on est à l'ouest, plus on est pro Union européenne (rouge). Le coup d'état de 2014 soutenu par la violence et l'Occident, a brisé l'alternance. Ce qui a incité la Russie à résister davantage à l'évolution de l'Ukraine vers les institutions européennes.

11L'Ukraine est un pays multilingue, dont l'ukrainien est la langue officielle en bleu sur cette carte et le russe la 2e langue la plus parlée, en rouge. 

Aujourd’hui, 68% des Ukrainiens considèrent l’ukrainien comme sa langue maternelle. Plus de 80% font leurs études en ukrainien, mais seuls 50% le parlent à la maison et seulement 39% l’utilisent au travail.

Le russe est la langue qui, pour beaucoup d’Ukrainiens, a encore un statut plus élevé que l’ukrainien. Très peu de gens croient que sa langue est seulement l’ukrainien ou seulement le russe: la plupart parlent suffisamment couramment les deux langues. On remarque qu'en Crimée (la pointe rouge), la langue russe est nettement majoritaire, de même qu'au Donbass vers l'Est, où la langue russe est majoritaire, mais un peu moins qu'en Crimée. 

Après le coup d'état de 2014, la Crimée, par référendum s'est jointe à la Russie (97% pour). Les souverainistes pro-Russe soutenus par la Russie ont déclaré l'indépendance du Donbass. L'Ukraine essaye depuis ce temps de récupérer militairement ce territoire mais n'y réussit pas, bien qu'un accord de cessez-le-feu conclu en 2020 souvent rompu, soit officiellement en vigueur. La Russie quant à elle, soutient les indépendantistes. 500 000 citoyens vivant dans le Donbass ont maintenant des passeports russes. 

Ligne rouge russe

122483635 carterussie png 2Aujourd'hui, Moscou exige des garanties que l'Ukraine ne rejoindra jamais l'OTAN. Le président russe n'a pas décidé d'une invasion; mais parle plutôt de mesures militaro-techniques de rétorsion appropriées si l'approche agressive de l'Occident se poursuit. Le vice-ministre russe des affaires étrangères prévient que les tensions peuvent conduire à une situation similaire à la crise des missiles de Cuba en 1962, lorsque les États-Unis et l'Union soviétique ont frôlé le conflit nucléaire. 

Moscou accuse l'Ukraine de masser la moitié de son armée, soit 125 000 hommes dans l'est du pays, attaquant sporadiquement le Donbass soutenu par la Russie, où plus de 14 000 personnes ont été tués depuis 2014. La Russie accuse l'OTAN de fournir l'Ukraine en armes. 

Le président Poutine avertit l'Occident de ne pas franchir les lignes rouges de la Russie en Ukraine. L'une d'elles est l'arrêt de l'expansion de l'OTAN vers l'est, ce qui inclut l'Ukraine et la Géorgie. La Russie souhaite également que l'OTAN abandonne ses activités militaires en Europe de l'Est, ce qui implique de retirer ses unités de combat de Pologne, des républiques baltes d'Estonie, de Lettonie et de Lituanie et de ne pas déployer de missiles dans des pays comme la Pologne et la Roumanie. Elle souhaite donc en quelque sorte que l'OTAN revienne à ses frontières d'avant 1997.

Le Kremlin, sentant l'OTAN trop près de ses frontières, a présenté deux traités, l’un aux États-Unis et l’autre à l’OTAN. Ces propositions prévoient d'interdire aux États-Unis d'établir des bases militaires dans tous les pays de l'ex-URSS non membres de l'OTAN, d'y utiliser les infrastructures pour toute activité militaire et même de développer une coopération militaire bilatérale avec ces états. Tous les membres de l'Alliance atlantique s'engageraient à ne jamais élargir l'OTAN et à ne mener aucune activité militaire sur le territoire de l'Ukraine et dans d'autres pays d'Europe de l'Est, du Caucase du Sud et d'Asie centrale, ne faisant pas partis de l'OTAN. Moscou souhaite obtenir des garanties juridiques. Ces traités, s'inspirent un peu de la situation déjà existante en Finlande et en Suède, pays limitrophes de la Russie qui ne font pas partis de l'OTAN, mais peuvent en devenir membre rapidement en cas d'urgence. 

Le soutien militaire américain à Kiev se déroule à la porte de la Russie. Moscou est déjà préoccupée par le déploiement de drones turcs contre les forces soutenues par la Russie dans l'est de l'Ukraine et par les exercices militaires de l'OTAN en mer Noire.

La Russie est également frustrée par le fait que l'accord de paix de Minsk de 2015 visant à mettre fin au conflit dans l'est de l'Ukraine est loin d'être respecté. Il n'y a toujours pas d'arrangements pour des élections contrôlées de manière indépendante dans les régions souverainistes. Élections qui règleraient définitivement le conflit militaire. 

Ligne rouge ukrainienne et américaine

Les services de renseignements occidentaux ainsi que ceux de l'Ukraine pensent qu'une incursion ou une invasion russe en Ukraine, pourrait avoir lieu au début 2022. Le directeur de la CIA estime que le président Poutine met l'armée russe et les services de sécurité russes dans une position, où ils pourraient agir de manière radicale. 

Le Royaume-Uni aide l'Ukraine à construire deux bases navales, à Ochakiv sur la mer Noire et à Berdyansk sur la mer d'Azov. Des missiles antichars américains Javelin ont également été envoyés en Ukraine et deux patrouilleurs des garde-côtes américains ont été donnés à la marine ukrainienne.

Alors que la Russie affirme catégoriquement qu'elle ne permettra pas à l'Ukraine de rejoindre l'OTAN, le président ukrainien attend de l'alliance un calendrier précis. Les États-Unis indiquent clairement qu'ils sont déterminés à aider l'Ukraine à défendre son territoire souverain. Le président Biden parle d'imposer des mesures comme il n'en a jamais vu, si l'Ukraine était attaquée. Mais il souligne également que le déploiement unilatéral de troupes américaines n'est pas à l'ordre du jour. De sorte que l'Ukraine affirme qu'elle est prête à se défendre seule. 

Les États-Unis refusent de reconnaître les lignes rouges de la Russie concernant l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, mais ne veulent pas s'impliquer directement militairement. De sorte que leurs principaux outils semblent être les sanctions et le soutien à l'armée ukrainienne. La Grande-Bretagne envisage une extension du soutien de la défense ukrainienne, tout en ne participant pas directement aux combats. 

L'Occident irait donc plutôt vers des sanctions économiques, dont le principal outil pourrait être de déconnecter le système bancaire russe du système de paiement international Swift appartenant à des Américains. Mais SWIFT résiste aux pressions politiques, sachant fort bien que si elle se plie aux exigences américaines, les banques visées par le blocus chercheront une autre solution et qu'elle les perdra définitivement en tant que clients. D'ailleurs Moscou pour contrer le coup, a déjà développé son propre système le SPFS. Des centaines d’établissements financiers russes ainsi que les géants étatiques sont déjà connectés à ce nouveau système qui est opérationnel. Une autre sanction serait d'empêcher l'ouverture du gazoduc russe Nord Stream 2 en Allemagne, prévue pour début 2022, reportée maintenant au milieu 2022. Moscou affirme que l'Ukraine, l'Allemagne et l'Union européenne mordent la main qui les nourrit, puisque l'augmentation du volume de gaz en Europe ferait baisser son prix. Il pourrait y avoir aussi des mesures visant le fonds souverain russe RDIF ou des restrictions sur les banques qui convertissent des roubles en devises étrangères. Mais, on sait fort bien que généralement les sanctions économiques ne sont pas efficaces. 

Négociation entre Russes et Américains

De toute façon, des négociations entre Américains et Russes auront lieu à Genève en janvier 2022. En fait, ce que veut la Russie est le règlement définitif du problème ukrainien, qui selon elle ne peut être réglé que par le respect par Kiev de la souveraineté du Donbass et du rattachement de la Crimée à la Russie. Pendant que Kiev et les Occidentaux pensent que la façon de régler est le retour du Donbass et de la Crimée à l'Ukraine. 

Si l'on en juge le verbal des États-Unis et de la Grande-Bretagne, l'OTAN et les États-Unis ne répondront pas militairement à l'armée russe. Ils répondront plutôt par des mesures économiques; on peut facilement en conclure que l'armée russe vient en fait de recevoir le OK des Occidentaux pour intervenir éventuellement militairement au Donbass, si le problème n'est pas réglé diplomatiquement par les négociations russo-américaines de janvier. Certes l'Occident chialera alors fortement, mais sans aucune conséquence militaire, puisque personne ne veut entrer en guerre contre la Russie possédant la 2e armée au monde. 

Pour ce qui est de l'OTAN, elle ne s'installera sûrement pas en Ukraine, ni  en Géorgie. Du moins, elle attendra quelques années. Elle réduira probablement ses installations en Pologne et autres, sans toutefois les enlever complètement. Tout ça dépendra si les États-Unis sont prêts à aller vers une course aux armements contre les Russes, pensant que ces derniers en sortiraient trop appauvris.  

Notons que la grande erreur des Occidentaux, a toujours été de considérer la Russie comme étant de mauvaise foi. Ils ne l'écoutent pas, la considèrent arriérée et sont convaincus que son armée est désuète. C'est du moins ce que véhicule la grande majorité des médias occidentaux. Mais lorsque les responsables occidentaux négocient en privé avec les Russes, ils deviennent alors très pragmatiques.         

Sources: 

BBC News : Géostratégie : la Russie se prépare-t-elle à envahir l'Ukraine ? Par Paul Kirby

Ukraine Crisis Media Centre : Ukrainien VS Russe: laquelle des deux langues a besoin de protection?, 17/03/18

 

 

 

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