L'accord russo-américain est-il réaliste?

 

Après cinq ans de guerre civile et des mois de discussions, Russes et Américains soutenant des camps adverses, annoncent une trêve pour lundi, trêve devant déboucher sur une coopération militaire inédite contre les djihadistes (l'EI et Fateh al-Cham). Cet accord coïncide avec le début de l'Aïd el-Adha, fête musulmane du sacrifice. 

Moscou allié du régime, Washington allié des rebelles dits modérés qui souvent ne le sont pas puisqu'ils s'entremêlent facilement aux djihadistes, ces deux puissances cherchent à relancer un plan de paix adopté fin 2015 comprenant un cessez-le-feu durable, de l'aide humanitaire et un processus de transition politique sur lequel les deux camps n'ont pas la même interprétation.  

Suite à cette entente, le régime syrien s'abstiendra de bombarder et de larguer des barils d'explosifs sur les zones tenues par l'opposition, à l'exception des secteurs sous contrôle djihadiste. Voila le problème, en ce moment l'opposition modérée semble très faible et est entièrement sous contrôle djihadiste. Washington doit convaincre les rebelles de se dissocier de groupes djihadistes dans les provinces d’Alep et d'Idleb, notamment du Front Fateh al-Cham (ex-Front al-Nosra qui a renoncé à son rattachement à Al-Qaïda) mais reste considéré comme un groupe «terroriste» par Moscou et Washington, tout comme l'EI.

Les rebelles semblent réticents à se retirer des fronts où Fateh al-Cham est présent, de crainte que le cessez-le-feu ne tienne pas. Beaucoup de figures de l'opposition voient cet accord comme une conspiration. D'après les analystes, il sera difficile pour les rebelles de se distancier de Fateh al-Cham, un groupe bien organisé et armé qui reste un pilier dans n'importe quelle bataille contre le régime. Pour les insurgés, s'en détacher signifie céder du terrain face au régime. 

Alep, connaît une situation humanitaire effroyable. Les quartiers Est, contrôlés par les rebelles et surtout Fateh al-Cham, sont assiégés. Il n'y a plus rien, ni légumes, ni sucre, ni viande. L'accord prévoie le retrait des deux parties de la route du Castello, principal axe d'approvisionnement vers Alep. Un corridor d'aide humanitaire y passera.

Si la trêve dure une semaine, les forces américaines accepteront de collaborer avec l'armée russe en Syrie, une coopération réclamée de longue date par Moscou. Un centre conjoint russo-américain coordonnant les frappes contre les djihadistes sera créé. Les militaires et les services secrets russes et américains s'occuperont des questions pratiques: distinguer les terroristes de l'opposition modérée. Ce qui n'est pas une mince tâche puisqu'à Alep même, les modérés et Fateh al-Cham semblent s'entre-mêler sous la direction de ce dernier. La région d'Idleb est contrôlé par Fateh al-Cham.

Les engagements inscrits dans l'accord doivent être totalement respectés avant toute coopération militaire potentielle. Les quotidiens New York Times et Le Monde expriment un certain scepticisme sur les chances de succès. 

L'envoyé spécial de l'ONU attend de toutes les parties, qu'elles facilitent les efforts des Nations Unies visant à livrer de l'aide humanitaire aux populations qui en ont besoin. Un membre du Haut comité des négociations de l'opposition et de la rébellion syrienne, exprime l'espoir du "début de la fin du supplice des civils". 

 

Sources:

La Presse : Syrie : un accord accueilli avec scepticisme, 10/09/16

Actu-Monde : Ce que prévoit l’accord entre les Russes et les Américains sur la Syrie, 10/09/16

France 24 : Trêve en Syrie : trois obstacles majeurs se heurtent à l'accord russo-américain, 10/09/16

RTL Info : Syrie: Américains et Russes s'accordent sur une trêve, 09/09/16